Prendre l'autocar

Ce matin, avant de sortir il avait regardé par la fenêtre et interrogé le bout de ciel. Il lui avait semblé que la journée serait ensoleillée. Et à présent il était trop loin de la maison pour retourner chercher un parapluie. Le temps d’arriver à la station des cars, il serait mouillé. Il remonta le col de sa veste et pressa le pas en baissant la tête pour affronter le léger vent d’est. La pluie, silencieuse et très fine lui mouillait déjà les cheveux. Involontairement, il regardait l’heure presque toutes les minutes. Le froid mordait sa main gauche chaque fois qu’il la sortait de sa poche pour consulter sa montre. Le chemin n’offrait aucun abri.
D’ailleurs, il ne pouvait pas se permettre de rater l’unique car matinal. Il se mit à courir. Il rythmait ses pas et les lointains aboiements. Il aurait voulu étouffer le bruit de ses chaussures sur la terre battue. Il ralentit l’allure pour calmer sa poitrine et faire moins de bruit. Enfin les premières lumières de la station de car. Une heure de trajet et il pourrait rejoindre son travail. Dorénavant, il sortirait plus tôt de la maison et se couvrirait mieux afin de ne pas tomber malade. Il avait tellement eu de difficulté à trouver cet emploi et il ferait tout pour le garder. Il était le premier arrivé à la station et le car n’y était pas encore. Encore un coup d’œil à la montre pour s’assurer qu’il n’était pas en retard. Il n’était que six heures du matin. Il se protégea un peu du vent derrière un poteau et attendit. C’est curieux qu’il n’y ait personne et même pas de car. Il réfléchit un instant et se tapa brusquement le front avec le plat de sa main. C’était vendredi. Ce n’était que le lendemain, samedi, qu’il reprendrait le travail. L’angoisse de perdre son travail avait détraqué l’horloge de sa tête.

Kourde Yacine.


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